Topol, Jachym: Výlet k nádražní hale
Výlet k nádražní hale (Czech) Město se měnilo. V noci nad ním sice stejně samozřejmě jako v 10. století a
jako kdykoli jindy visel měsíc v tmavý bráně, někdy plný a oteklý jako tvář
opilce, jindy plaval v mracích a nebyl skoro vidět, skleněná cetka, nežhnul,
ale stejně doháněl zparchantělé městské psy k šílenství. V tomhle svitu,
kdykoli měsíc dosáhl svý chladný intenzity, milenci dopili láhev a vrhli se na
sebe, koutky vykousaný z velký lásky, vrahoun otočil kudlou v ráně a zašklebil
se, v tomhle světle hodná máma zničehonic provedla svýmu plaváčkovi něco
úděsnýho a žlutá síla tekla dolů a stékala na koleje tramvají a vlaků a ty se v
té záplavě světla leskly... Pán světa chytil noc ve středu temnoty a obrátil ji
naruby jako čerstvě staženou kůži, na nebi hořelo slunce. Bilo do městských zdí
a chodníků a teprv teď byla špína špínou a hniloba hnilobou a byly vidět.
Slunce sálalo, nutilo krev, aby se pohybovala pomaleji, tekla líně, zesládla,
nebo naopak, pumpy zběsile pracovaly a krev jako by chtěla stříkat z obalu. Tak
mi to alespoň připadalo, nic moc hezkýho.
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Excursion dans un hall de gare (French)La ville se transformait. Dans la nuit qui la surplombait, la lune était suspendue à son portail obscur, tout comme elle l'était déjà au Xe siècle et comme elle l'avait été à n'importe quelle autre époque, tantôt pleine et bouffie comme un visage d'ivrogne, tantôt voguant parmi les nuages, babiole de verre presque invisible ; elle n'était pas incandescente et rendait pourtant fous tous les bâtards de la ville. Dans cette luminescence, à chaque fois que la lune atteignait sa froide intensité, les amants vidaient leur bouteille et se jetaient l'un sur l'autre, bribes dévorées d'un grand amour, l'assassin tournait son surin dans la plaie en faisant une grimace, dans une lueur pareille, la gentille maman faisait à son petit bambin quelque chose d'horrible et une force jaune se répandait sur le sol et dégoulinait le long des rails des trams et des trains qui brillaient dans ce déluge de lumière... Le seigneur de toutes choses saisit la nuit au coeur même de l'obscurité, et la retourna comme une peau fraîchement retirée, le soleil brilla dans le ciel. Il frappait les murs de la ville et les trottoirs et alors seulement la crasse était crasse et la putréfaction putréfaction et elles étaient visibles. Le soleil rayonnait, il forçait le sang à circuler moins vite, à couler paresseusement, ou bien au contraire, les pompes travaillaient avec acharnement, et le sang semblait vouloir gicler hors de son enveloppe. C'est du moins ce qui me semblait. Rien de bien joli. La ville se transformait, les grilles et les rideaux de fer descendus et
offerts depuis des années à la rouille étaient repeints, et on les voyait
souvent barrés d'un écriteau avec un nom. Les caves poussiéreuses et les gargotes
du quartier juif étaient ingénieusement reconverties en magasins de luxe. Ici,
on pouvait acheter des coffres de navires datant du siècle dernier, un petit
livre dicté par Madonna elle-même avec sa chaîne, des ananas et du tabac doux,
des journaux intimes de comédiennes décédées, les roues très snob de voitures
ayant appartenu à Milos Forman, ainsi que des martinets, des poupées, des
graals de voyage ayant recueilli le sang d'un aventurier, des pièces de
monnaie, des portraits de Kafka, des stands de tir avec tous les présidents
communistes, des nippes, des os, des peaux et tout un tas de choses. En
retrait, dans la vitrine, on pouvait voir deux statuettes représentant des
hommes-chiens, dont la silhouette ployait sous le fardeau de leurs paniers d'osier,
qui regardaient derrière elles et connaissaient peut-être ton nom. Ces
statuettes figuraient le diable, et longtemps personne ne voulut les acheter.
Je fus soulagé quand elles disparurent enfin de cette vitrine. Mais le
lendemain, à leur place, se dressait la statuette d'une femme à tête de chat,
avec des cheveux de jais, des yeux verts, elle était sertie de pierres
précieuses et ces cheveux étaient des cheveux humains. C'est d'ailleurs
l'impression qu'elle donnait. L'entreprise à laquelle appartenait le magasin
s'appelait Pozener, elle était basée à Vienne, et son sigle représentait des
cornes de taureau.
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